Il était une fois ane enfant qui dansait en portant un éléphant sur son épaule. On s’arrêtait près d’ellui, et parfois, on lui jetait une pièce ; mais iel ne se souciait pas des pièces qu’on lui jetait : iel continuait de danser. Et iel ne s’interrompait jamais.
Un jour, ane vieilleux lui demanda : « Pourquoi danses-tu ainsi, alors que le monde va si mal ? » L’enfant répondit : « Si je peux porter sur mon épaule un éléphant en même temps que je danse, je pourrais bien porter aussi toutes les larmes de la terre. »
Lae vieilleux voulut savoir si ce que l’enfant disait était vrai. Iel parcourut le monde entier, et recueillit toutes les larmes qui coulaient des yeux des femmes, des lummes, des hommes, des enfants, des animaux et de la terre elle-même. Iel revint ensuite où se trouvait l’enfant et lui tendit les larmes : alors, l’enfant les prit et ne put plus danser.
Lae vieilleux fut déçux ; car iel avait cru, vraiment, que l’enfant pourrait porter toutes les larmes du monde : après tout, n’avait-iel pas porté un éléphant sur son épaule ? Le temps passa, et l’enfant devint vieilleux. « Pourquoi ne tenterais-je pas de danser à nouveau ? », pensa-t-iel ; la mort n’était pas loin d’ellui.
Iel se leva donc de son lit, sortit de sa maison et se mit à danser. Personne ne s’arrêtait pour lae regarder ; il faut dire que sa danse était bien maladroite.
Le soleil n’était pas encore couché qu’ane enfant s’approcha d’ellui : « Pourquoi trembles-tu ainsi de froid ? demanda l’enfant à lae vieilleux. — Ce n’est pas que je tremble de froid, répondit çae dernierx, c’est que je danse. — Pourquoi tes jambes ne te portent-elles plus ? demanda l’enfant à lae vieilleux. On dirait que tu es en train de tomber. — Ce n’est pas que je tombe, répondit lae vieilleux, c’est que je suis en train de danser. — Pourquoi as-tu le dos courbé ? Et pourquoi as-tu besoin d’un bâton pour marcher ? — Ce n’est pas le bâton qui me soutient, mais moi qui soutiens le bâton, dit lae vieilleux. Ne vois-tu donc pas que je danse ? — Pourquoi, demanda l’enfant, danses- tu alors que la mort est si près de toi ? »
A cette question, lae vieilleux ne répondit pas.
Et iel dansait encore quand le soir fut tombé, et que l’enfant était déjà partix loin, très loin jouer avec d’autres enfants.
A force de danser, lae vieilleux qui avait jadis été ane enfant redevint enfant : iel portait la mort sur son épaule, ainsi que toutes les larmes du monde. Le tout ressemblait à un éléphant.