Savez-vous d’où vient l’abeille ? Je vais vous le raconter. Cela remonte à un temps très ancien, un temps où la pâte du monde portait encore l’empreinte de Diex toute fraîche, toute lumineuse.
A cette époque donc, les êtres humains vivaient dans des jardins, de grands jardins immobiles où les fleurs ne mouraient jamais. Et comme elles ne mouraient jamais, elles n’avaient pas non plus besoin de se répandre : elles étaient vénérées comme de petites déesses impassibles.
Mais un jour, il y eut ane ange-enfant (je l’appelle ange-fant) qui voulut voler plus haut que Diex.
L’ange-fant s’éleva, s’éleva jusqu’à tremper sa bouche dans les rayons du soleil : quel délice ! mais aussitôt, ol retomba.
Et quand ol retomba, cela fit un vacarme tel que les fleurs bougèrent.
Depuis la chute de l’ange-fant, tout bouge, se trouble et tourne et tourbillonne sur cette terre. Et ce jour-là, ce fut une telle pagaille que la Mort en profita pour s’inviter dans la danse, ni vu ni connu.
Mais aussi ce jour-là, Diex rit beaucoup et appela l’ange-fant « abeille », parce qu’ol avait fait « aïe, aïe, aïe » en retombant. Al lui dit : « Ce sera toi ma messagère ; et tu auras toujours du soleil à la bouche. Si l’on essaye de te prendre tes trésors, sors ton dard mais fais-le avec discernement, car l’ange de lumière qui blesse est vouae à mourir. »
Là n’est pas la seule mission de l’abeille qui répand la bonne nouvelle de fleurs en fleurs jusqu’aux confins de la terre.
C’est elle aussi qui m’a appris que même notre mauvaise bile et nos pires crachats peuvent être or et lumière.
Vous connaissez maintenant l’histoire de l’abeille telle que la racontaient nos grand-mères dans des temps très anciens.