À C.
Si le temps a filé entre mes doigts,
n’y laissant plus qu’un cordon
d’eau amère,
j’ai vu dans tes yeux une graine de lumière,
qui semblait dire au temps une promesse.
Qu’était-ce ? était-ce une graine ?
était-ce le printemps de bois vert ?
était-ce la cathédrale horizontale d’une rivière ?
Alors, la rivière s’échappe de tes yeux :
c’est la rivière qui joue
entre les pierres et ferait pleurer jusqu’aux cœurs
les plus arides ;
c’est le printemps qui sourit au bord des cerisiers ;
c’est peut-être la graine qui dit au temps :
« Je te promets quelque chose… Quelque chose
que tu n’as jamais vu. Crois-moi, dans ma gangue,
et ma langue, et ma chair,
il y a des branches pour embrasser le ciel,
pour fleurir comme mille oiseaux. »
Elle me dit à moi :
« Le semeur est sorti pour semer ;
je n’ai jamais aimé autre chose que dormir
au centre des yeux de l’amour.
Un jour, je me réveillerai et nous serons
ces phénix d’eau fraîche qui ne connaissent
que les lendemains et les aujourd’hui,
devant le sillon de cendres
qui précède toute aurore. »
Voilà ce que me dit la petite graine qui dort
dans tes yeux comme dans l’humus aérien
d’une grâce humaine.
Est-ce une graine ?
est-ce le printemps de bois vert ?
ou bien la colonne couchée d’une rivière ?
Ton regard ne dort plus depuis qu’il est là,
dans le mien.