La rose miraculeuse

Il était une fois un prince, le seul héritier du royaume de son père, pourvu de toutes les qualités : il était beau, courageux et intelligent. Un jour, ce prince néanmoins tomba gravement malade. C’était une maladie telle qu’alors qu’il était encore en vie, son corps pourrissait et se décomposait ; il devint bientôt puant, affreusement laid, et son père lui-même ne pouvait plus le regarder en face.

Le prince se désola, désespéra, cessa de boire et de manger, et songea même à se tuer. Il allait le faire quand la veille du jour où il avait prévu de quitter le monde des vivantz, il fit un rêve étrange : il rêva d’un rosier mort au bout duquel se trouvait une rose telle qu’il n’en avait jamais vue ; elle était fraîche, délicate, toute épanouie ; et autour du rosier, il neigeait de telle sorte que la présence de cette rose était comme un miracle.

Le prince la regardait avec amour et admiration, quand il entendit une voix venue du ciel : « Si tu trouves cette rose, il te suffira de la cueillir et de la manger pour que ton corps et ton esprit retrouvent la santé. »

A son réveil, le prince se souvint de son rêve. Il parcourut le monde à la recherche du rosier. Il marcha longuement, comme un errant, un vagabond, rejeté par tout le monde ; personne ne savait qu’il était prince, et les enfants lui jetaient des cailloux. Il traversa sept forêts, quatre fleuves, trois océans, et deux déserts avant de parvenir au bout du monde.

Au bord du monde se trouvait une montagne enneigée. Le prince la gravit. Quand il fut au sommet, il trouva le rosier mort, et au bout du rosier, tout en haut, la rose miraculeuse. Sa couleur était à la fois douce et violente, ses pétales tendres, sa tige fragile et couverte d’épines ; il fut si ému par tant de beauté que les larmes lui montèrent aux yeux. Il tendit la main pour la cueillir, mais il arrêta son geste avant même de toucher la fleur. Il essaya une fois, deux fois, trois fois, puis poussant un grand soupir d’amour ou de chagrin, ou des deux à la fois, il s’assit à trois coudées devant la rose. Il resta là, assis, jusqu’à sa mort.

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