poèmes

zad

autrefois mes paroles de raison coulaient
aujourd’hui elles heurtent
elles sont comme le torrent
qui se fracasse contre les cœurs de terre
et de pierre
et même les cœurs secs hors sol hors soleil
qui ont oublié ce que signifie terre
elles courent comme pour devancer
la fin du monde
ou pour fuir le désespoir de ne jamais réussir
à devancer la fin du monde
elles éclaboussent les bords
les marges
les zones indéfendables
les zones de l’ombre

elles atteignent l’attention parfois
des hors d’atteinte des
zones
à
déconstruire

je veux maintenant chanter comme on hurle à l’amour
je réclame le droit de rêve
et de manifester
l’épiphanie des coups de gueule de foudre
seulz les anges en colère méritent notre attention
car ce monde se porte si mal que cellui qui le refuse
activement
crée plus que cellui qui l’a créé

Je ne veux pas ressembler aux
humainz
sans
brisures ni
crises

car j’ai toujours écrit au seuil des tempêtes
avec des catastrophes au-dessus de la tête
et des raz-de-marée de ras-le-bol de colère
dans la voix
j’ai cousu ma bouche
avec le fil incandescent
des plumes sans-voix
condamnées au silence à perpétuité
discréditées
invalidées
jusqu’à ce que nos prisons de mots convenus
et de normes harmonieuses armées
d’ordre total
de beauté policière
sans autre dissonance que nos larmes inécoutées
soient désécrites
jusqu’à ce que nous ayons compris
que les poèmes qui crient
sont ceux auxquels on n’a jamais donné le droit
de chanter

all
cacophonies
are
beautiful

je lève le poing comme un point d’interrogation à l’avenir
plus tard nous les sans-voix qui crions crassement
nous mourrons sans odeur
de sainteté
moi je voudrai que l’odeur de nos mains meurtries sorte de terre
sans repos
sans aucune paix tant que le monde sera sans aucune paix
que la terre enfantôme l’avenir
accouche de nos cris mort-nés
se souvienne de nos rêves inachevés
nous laisserons derrière nous une raison hantée
nous serons la conscience qui ruine les âmes bien nées
nous serons de ces silences qui ont trop parlé

mémoire des luttes passées
reste
indéfiniment
prête
redis/rumine
indéfiniment tes
promesses
recommence
indéfiniment à
parler/protester/prophétiser ou
ris
insolemment de ta
postérité

mais ne te laisse surtout pas
reposer en paix – car ce serait mourir une seconde fois

à quoi bon écrire aujourd’hui des livres
que personne ne souhaite brûler

je désire une

révolte
inflammablement
poétique

ce qui n’a pas la possibilité d’être littéral
de peur d’être raturé
c’est la littérature

parle par métaphores pour porter jusqu’au dehors
où nos zones de conformité
et nos portes de raison de prison
subversivement s’achèvent jusque hors des limites
infinies du langage nos paroles abruptes
étonnamment vivantes

c’est ce que j’ai toujours donné à la poésie
un impératif presque inutile
un ordre quasi bordélique

atteinte à l’ordre poétique
à chaque jeu de mot nous jouons à balles
réelles
ne faisons pas de poésie digne de ce nom
mais une poésie indignée
pourquoi donc la beauté dans un monde qui la détruit sans cesse

le bon goût est un mensonge
dans la bouche de qui a goûté la lie des fins des temps
hurlons désaccordons
ne faisons pas de jolis vers ni de poèmes qui élèvent l’âme
ce serait lui promettre des lendemains qui mentent

la beauté seule ne sauvera pas le monde

poèmes

au point de nuit

au point de nuit
j’ai bu le café noir de l’aurore
la brume amère pelure d’orange
triste
tombait sur les collines
il y avait un chemin
dans la terre brune où l’avenir
et les promesses
avaient laissé leurs traces de pas

poèmes

je suis folle

je suis folle et plus brûlante
qu’une ruée d’étoiles
tombant à balles perdues
errantes

en voie de trouver
peut-être

j’ai jeté ma lumière
par toutes les fenêtres

poèmes
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