à L.
tes yeux bruissent comme l’herbe chaude et ombreuse
des nuits d’été
ils palpitent comme de petits papillons noirs
près des feux de la Saint-Jean
ils sont danse
ils portent encore en eux la trace de l’orage
ils sont l’éclair qui soulève sa frange d’or
le flacon de parfum que les anges ont brisé sur la terre
les étoiles filantes abandonnent leur cape d’argent
derrière elles
de même ton rire quand tu es loin de moi
demeure entre mes mains
ta voix est le cordon blanc des constellations
qui se dénoue avec grâce
si bien que quand tu ris
les étoiles semblent frôler la terre
ta voix est si douce que je crois entendre les grelots de pluie
attachés aux poignets des rivières
quand tu ris avec moi
quand tu murmures à mon oreille les grillons vacillants de tes soupirs
j’entends la nuit fredonner
j’aimerais me perdre dans tes cheveux
comme dans un labyrinthe aux haies sombres et profondes
les oiseaux migrateurs y froissent leurs ailes noires
et le ciel y frissonne
l’éternité tremble
comme si le paradis lui-même dans l’enchevêtrement
et le vertige de tes boucles
s’était perdu
tes mains rondes se sont recroquevillées sur les miennes
comme la coquille fragile de l’escargot
ton prénom est si léger qu’il me semble soulever les
nuages
quand je le prononce
quant à ton âme
je crois l’avoir aperçue un peu entre les plis des rideaux de tes yeux
qui bougeaient doucement et penchaient
à la manière des vagues souples d’un océan profond
elle s’abritait là derrière le paravent sombre de ton regard
elle ressemblait à la petite buée de clarté
que laisse sur la vitre
un enfant qui rêve
et le reste est si ténu et si petit
que je crois qu’aucun mot ne pourrait le redire
ces mots avanceraient-ils comme des voleurs
à pas de loup
ce quelque chose en toi cligne comme un
chut
j’ai gardé les lèvres presque closes
juste de quoi
laisser fuir un poème