Lors de la naissance du Sauveur, une étoile apparut en Orient. Trois mages voulurent partir en direction de l’étoile qu’ils avaient observée ; par leur science, ils savaient qu’un grand roi venait de naître, celui qui a tout pouvoir, y compris celui de renoncer à tout pouvoir.
Ils se mirent en route.
Sur leur chemin, une jeune femme du nom de Zépioure se présenta à eux : « Où allez-vous ainsi ? leur demanda-t-elle. – Nous avons vu cette étoile à l’Orient qui nous a appris qu’un grand roi venait de naître et nous allons lui rendre hommage. » Zépioure leur répondit : « Emmenez-moi avec vous ! – Tu es folle ? Nous voici chargés d’or, de myrrhe et d’encens ; mais toi, qu’auras-tu à lui offrir ? » Zépioure insista, insista mais cela fut en vain ; et les mages poursuivirent leur route.
Zépioure se promit à elle-même de rencontrer le grand roi dont les mages lui avaient parlé. Elle marcha plusieurs jours dans la direction de l’étoile que lui avaient montré les mages. Au moment où elle approchait de la Judée, elle se découragea et décida de rentrer chez elle.
Les années s’écoulèrent et Zépioure vieillit.
Mais alors qu’elle frôlait les portes de la mort, elle demanda à ses trois filles qui étaient à son chevet : « Donnez-moi une raison de ne pas mourir et peut-être que je vivrai encore. » Sa fille aînée lui dit : « Si tu meurs, nous devrons nous occuper de la maison et des affaires seules. » Sa fille cadette lui dit : « Si tu meurs nous serons toutes plongées dans une tristesse sans fond. » La benjamine qui était restée à regarder par la fenêtre ne dit rien. Zépioure se mit en colère : « Est-ce ainsi que tu essaies de sauver ta mère ? » La benjamine lui répondit : « Ce rosier dans ton jardin que je vois par la fenêtre est plus beau que le visage de la mort. »
Aussitôt, Zépioure se leva pour aller regarder le rosier. Et c’est ainsi qu’elle fut guérie.
Quelques semaines s’écoulèrent pendant lesquelles Zépioure sentait un regret indicible lui fendre l’âme.
Un jour, elle décida de partir sur les routes. « Tu es trop vieille maman ! » lui dirent ses filles. N’en faisant qu’à sa tête, Zépioure prépara ses affaires pour le voyage.
Mais alors qu’elle se tenait dans son jardin, s’apprêtant à partir, une main se posa avec une infinie douceur sur son épaule. Elle se retourna. Elle vit devant elle un visage de lumière : « Je suis le roi des rois et je suis partout où tu me cherches. »
Zépioure laissa tomber ses affaires, stupéfaite et hors d’elle-même.
L’inconnu lui raconta alors qu’il était le Christ, le Fils de Diex, qu’il avait été crucifié et qu’il était maintenant ressuscité.
C’est alors que Zépioure se mit en colère. « Tu t’es laissé mourir alors que tu es Fils de Diex ? » Il y eut un long silence.
Zépioure s’approcha du rosier de son jardin et dit au Christ : « Ton corps ressuscité peut-il sentir le parfum de ces roses ? »
Silence.
On raconte que depuis ce jour, le Christ a quitté la terre et s’est reclus quelque part au-dessus des ciels pour pleurer ; on ne l’a plus revu depuis, mais il arrive que l’on voit ses larmes poindre sur les fleurs les matins de printemps.