Il était une fois un gouffre dans la mer, un immense tourbillon dont on ne pouvait s’assurer qu’il avait un fond ou non. Ce tourbillon absorbait quiconque approchait trop près de lui : cent montagnes parmi les plus élevées du monde n’auraient suffi à le remplir — on l’appelait « l’Enfer. »
Un jour que des marins l’interrogeaient pour savoir quel remède trouver à tel fléau, la sainte du village dit : « Jetez Diex dans l’Enfer et il se refermera à tout jamais. »
Les marins dirent : « Elle blasphème. » Seule une jeune femme au teint hâlé, la fille d’un des marins la prit au sérieux. Elle pria chaque jour pour demander à Diex de se jeter dans le gouffre. Cependant, elle n’obtint pas de réponse. Elle décida alors de pousser Diex de force dans le gouffre :
« Tant pis s’al en meurt, il faut que le gouffre se referme. »
Elle se rendit au ciel. Apercevant l’ombre de Diex, elle s’approcha de çae dernierx. Elle lui dit :
« Allons nous promener au bord de l’eau. » Diex accepta. Et c’est alors qu’elle lae précipita dans la mer.
« J’ai tué Diex ! » s’écria-t-elle.
A peine eut-elle dit cela que le gouffre se referma. La mer devint toute apaisée.
Quelques jours plus tard, elle se rendit chez la sainte femme et lui dit : « J’ai enterré Diex en enfer. » La sainte femme répondit : « C’est très bien. »
La fille du marin s’exclama : « Je croyais que tu aimais Diex et je t’annonce sa mort ! » La sainte femme répondit : « Je préfère Diex mortx et la mer apaisée que Diex vivantx et la mer en furie. »
La jeune fille dit : « Mais alors, crois-tu bien en Diex ? » La sainte femme répondit : « Bien sûr. »
La fille du marin après cette discussion se rendit près de l’eau, qui n’était plus ni obscure ni terrifiante. Elle s’en approcha si bien qu’elle entendit bientôt un chant : c’était le paradis englouti qui sonnait ses dernières trompettes.
On dit que le paradis a suivi Diex dans sa chute, et lae suit encore aujourd’hui. Voilà pourquoi depuis cette époque-là le ciel jette son bleu dans la mer.